Histoire XXXIV

Un article de Caverne des 1001 nuits.

(Différences entre les versions)

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La nuit prenait fin. Le dernier lever de soleil. A mesure que la lumière bleutée s'étendait sur le champ de bataille, il prenait plaisir à respirer l'air froid qui rendait ses blessures plus supportables. Des îlots de lumière rouge étaient assaillis par une brume blanche et lumineuse qui pourchassait les restes de la nuit. Le matin avait toujours été l'instant qu'il détestait le plus, et cependant qu'il gisait là, seule ombre vivante dans le blanc blafard du jour, il contemplait le dernier matin avec une curiosité teintée d'amertume. Les cadavres gisaient de ça de là, semblables à des pantins désarticulés. Eux avaient déjà effectué le voyage.

D'un mouvement difficile de la tête, il fixa son armure rougie du mélange des sangs. Il comptait les secondes avec un dégoût presque hérétique.

Le jour se levait paresseusement tandis que la bise gelait un coeur brassant de moins en moins de sang. La terre labourée par les armées vomissait ses trop-pleins de viande en des mares rouges. La bataille était gagnée à ce qu'il avait saisi des mouvements qui avaient suivi sa chute. Une seconde d'inattention avait causé sa perte. Il en avait maudit les cieux de rage.

Son épée gisait brisée à ses côtés, à demi plantée dans une tourbe pourpre. Bientôt, les égorgeurs viendraient. Il leva les yeux vers le monde bleu qui prenait possession du charnier, marmonna quelques mots pour achever l'oeuvre que la nuit avait abandonnée.

Un bruit de sabots retentit à travers les arbres parés de brume qui entouraient la clairière de silence. Le pas était lent et s'interrompait souvent. Il envisagea que sa dernière heure sonnait. Mais le cheval apporta un visage familier au dessus de l'amas de chair et de métal. La haute stature souillée de terre rouge s'accroupit près de lui. Il ne parvint pas à se souvenir de son nom. Les nouvelles étaient bonnes : la bataille était gagnée quoique qu'on l'eut cherché depuis des heures sans succès.

D'une voix qui venait déjà d'un autre monde, il demanda de voyager seul dans les derniers instants de sa vie. Il ferma les yeux alors que déjà le cheval s'éloignait à pas feutrés. Il aurait aimé voir le feu brûler une dernière fois avant de quitter cette mare stagnante. Le feu et ses volutes de fumée découpant des formes aiguës et vives sur des masses d'ombres répandues en chaos.

Une douleur déchira sa poitrine. Il tenta de gémir une dernière fois mais n'exhala un air rauque qu'en sens unique. Sa tête tomba de côté. Sa vue se brouilla.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, une femme de grande beauté se trouvait en armure sur un destrier à le regarder. Alors qu'ils chevauchaient dans le vent, il contempla les murailles imposantes du palais d'Oden.



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