Histoire X

Un article de Caverne des 1001 nuits.

(Différences entre les versions)

1001nuits (Discuter | Contributions)
(Nouvelle page : {{RPL|I|l était rentré tard. Crevé.}} {{R|Il se débarrassa de ses pelures et de sa petite mallette qui commençait de lui être insupportable. Ses vêtements lui collaient à la ...)
Différence suivante →

Version du 29 juillet 2007 à 16:47

Il était rentré tard. Crevé.
Il se débarrassa de ses pelures et de sa petite mallette qui commençait de lui être insupportable. Ses vêtements lui collaient à la peau tellement il avait fait chaud dans les bureaux du quarante-cinquième étage.
Il finit de se déshabiller et plongea dans une baignoire où il rencontra une eau riche en bulles et parfumée. Il macérait avec délectation, arrosé d'ondes de quatuors de Beethoven, de ceux qui lui redonnaient de la vitalité.
Au sortir du bain, il se sentait mieux. Pourtant, une nausée, qu'il attribua à la chaleur excessive de son bain, le submergea soudain puis disparut doucement comme une onde d'eau qui se retire à marée basse. Le peignoir avait flotté si longtemps dans l'humidité suffocante de la salle de bains qu'il s'imposait désormais comme le médiateur idéal entre l'eau chaude du bain et l'air chaud et sec de l'extérieur. S'imaginant proche du nirvana, il détendit ses doigts de pieds dans un excès de sentimentalité. Il bailla trois fois puis s'étira.
Il se dirigea vers le bar qu'il ouvrit avec volupté afin de se servir un rafraîchissement bien mérité. Il hésita, opta pour une bouteille obscure qui ne méritait pas que l'on se vantât de la posséder. From the reserve, se dit-il amusé.
Il s'installa dans le grand fauteuil mœlleux du salon, s'y cala, retourna son verre dans sa main afin d'admirer l'indispensable dépôt noir, sourit plusieurs fois et goûta. Quel ravissement !
Son fauteuil faisait face à d'autres bâtiments d'une hauteur comparable à celui qu'il habitait. Cependant, sa position élevée lui donnait une vue imprenable sur nombre de toits. La maison qui lui faisait face, haute de plusieurs étages, suivait un croisement de rues avec un arrondi dans lequel, au dernier étage, des fenêtres pointaient leur nez sur les pentes de l'abrupt toit. Sirotant sa boisson tranquillement, il remarqua qu'une chose bougeait au sommet dudit toit. Lorsqu'il tenta de concentrer son regard sur le lieu critique, il ne put écarter avec certitude l'idée d'un effet d'optique. Reprenant son activité, il pensa à autre chose, puis fut de nouveau attiré par un mouvement en haut du toit. On aurait dit un objet métallique. Oui, c'était cela. Et c'était comme si celui-ci se déplaçait le long du toit. Mais, maintenant qu'il y regardait de plus près, il en voyait deux ! Et ces objets ressemblaient à des boules de métal dont la courbure aurait été tronquée en quelque endroit. Il aurait parié reconnaître ... des casques du Moyen-Age ! Il délirait. Il regarda son verre surpris que l'alcool pût lui faire tant d'effet. Et au fait, d'où venait la bouteille ? Il ne savait d'où. Peut-être un poison ? Il laissa tomber ses réflexions pour s'absorber dans la contemplation des mouvements de ces deux bouts de métal à la cime du toit d'en face. D'ailleurs, le nombre de casques grandissait, et leur cime se promenait à la lisière du toit laissant la base invisible. Au bout d'un instant, il ricana en réalisant que des personnes devaient porter ces drôles de casques démodés pour monter sur leurs toits. Les habitudes des gens de cette ville étaient si étranges. Et maintenant des hallebardes. Des hallebardes ? Impossible ! Il se précipita vers sa fenêtre et regarda attentivement. Le verre était resté en l'air, espérant qu'il reviendrait à son siège ; cependant, après quelques secondes de vaine attente, il se précipita sur le sol pour se briser en deux morceaux parfaitement symétriques. La boisson attendit la chute du verre pour regagner délicatement dans les airs la bouteille sans étiquette, restée ouverte par une incroyable négligence. Les hommes, appuyés sur une structure invisible de l'autre côté du toit, commençaient à émerger et à brandir leurs armes en poussant des cris agressifs. Il se frotta les yeux, se pencha pour regarder la rue mais la présence d'un balcon qu'il n'avait jamais remarqué obstruait sa vue. Des échelles venaient maintenant s'accoler au toit du bâtiment et elles semblaient avoir sa rue pour origine ! Dessus, des hommes armés en armure tentaient de prendre d'assaut la muraille, alors que, de sa fenêtre, les yeux ronds, il considérait qu'emprunter les escaliers était la moins déraisonnable des solutions. Les hommes postés sur le toit repoussaient les échelles garnies dans le vide, ou combattaient les féroces assaillants. Des hommes chutaient dans le vide avec des cris de douleur tandis que d'autres hurlaient pour que leurs coups fussent plus violents. Il ouvrit sa fenêtre, se rua sur le balcon et contempla la rue grouillante de soldats, de chevaux hennissants, de feux et... de catapultes ! Une des catapultes tira dans sa direction faisant céder le balcon sous la violence de la confrontation avec la lourde pierre. Ensanglanté, il tomba dans le vide et personne n'entendit ce qu'il cria avant de s'écraser à terre dans le fracas des armes et des cris.


Navigation
Précédent - Suivant
[[Catégorie:Journal de contes, Livre {{{5}}}]]