A propos de la représentation

Un article de Caverne des 1001 nuits.

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Sommaire

[modifier] Introduction

Notre esprit est habitué dès tout petit à manipuler des représentations, à les créer, à utiliser sur ces représentations des fonctions de divers ordres (comparaison, mesure). Ces représentations divisent l'esprit en y générant des conflits produits par les incomplétudes des représentations utilisées et par les contradictions de ces représentations entre elles.

Nous allons tenter d'étudier les caractéristiques de ces représentations afin de découvrir leur fonctionnement.

[modifier] La division de l'esprit

[modifier] Observateur et observé

Les représentations de notre esprit séparent ce dernier en morceaux, une partie se postulant comme l'observateur (et souvent le constructeur) de la représentation, une partie étant la représentation elle-même. La représentation est une projection de l'esprit nous masquant en la simplifiant, en la distordant, la réalité. Lors de cet exercice de représentation, notre esprit use de deux grands types d'approximations :

  • il nous fait croire que l'observateur et l'observé sont des entités distinctes (le sujet et le sujet, le moi et l'objet observé) ;
  • il nous fait croire que la représentation est conforme à la réalité de l'objet, voire que cette représentation est l'objet (ce qui se produit souvent au travers du mot lui-même).

En ce qui concerne la première approximation, le fait est que l'observateur et l'observé sont de la même substance. L'esprit endossent deux "rôles" distincts durant l'activité de la réflexion. En effet, la réflexion est l'action de regarder intérieurement une image projetée intérieurement et donc, au final, de se regarder soi-même, alors même que l'on pense regarder l'objet. Mécaniquement, la réflexion est donc, comme son nom l'indique littéralement, une analyse de ce que nous avons en nous, une analyse par le moi de ce qu'il y a dans le moi. Par la réflexion, nous ne sortons donc jamais du moi.

Dès lors que nous regardons au travers de notre raison les phénomènes et les sensations du monde, nous rationalisation ces phénomènes en ne faisant, au final, que nous regarder nous-mêmes. Ainsi, la singularité des phénomènes et des sensations nous échappe, la plupart du temps.

[modifier] Sujet et objet

Bien que le distinguo sujet et objet ait cours dans la philosophie occidentale depuis des siècles, force est de constater qu'il est nécessaire de remettre en question ce distinguo. Quand nous pensons à un objet, nous sommes à la fois celui qui pense et l'objet lui-même, qui est le fruit de notre représentation. Comment donc espérer connaître quelque chose de neuf quant à l'objet, alors que nous ne sommes que dans notre pensée, et que cette représentation de l'objet ne peut se faire qu'au travers de nos diverses expériences de cet objet, soit dans le passé ? L'objet est donc tout sauf séparé du sujet. Il est dans le sujet, il est même en un sens le sujet, et seul l'ego nous donne cette illusion que nous allons le saisir via la représentation.

Il en est de même pour le sujet. Cet dernier, ce "moi", est une représentation qui se formule dans mon esprit au travers de phrases types du genre : "je suis ceci", "je ne suis pas cela", "j'aime ceci mais pas cela", "je sais faire ceci mais pas cela", "je possède ceci", etc. Ce moi en nous est étroitement lié à la représentation qu'il a pour nous.

Des philosophes ont travaillé sur cette division du moi, trouvant des concepts pour le décrire, pour diviser dans ce moi, ce qui fait partie de soi et ce qui fait partie du monde. Mais les concepts ne sont-ils pas aussi issus de notre pensée ? Lorsque nous pensons ces concepts, ne sommes-nous pas les concepts eux-mêmes ? Dès lors que la raison intervient, nous avons l'illusion de pouvoir analyser le moi, mais le sujet et l'objet étant la même chose, cette illusion provoque des scissions au sein de nous-même, des oppositions, des conflits intérieurs, du fait même de la manière dont elle est construite.

Si donc, nous recherchons à savoir ce qu'est la moi sans pour le moment recourir à notre intellect, il est utile d'aller voir de quelle manière les autres nous représentent, ou du moins représentent notre moi. Nous pourrions dire ainsi que, d'une certaine façon, la représentation de notre moi est connectée au reflet de notre ego dans les autres personnes. En effet, au travers de mes interactions avec les autres personnes, je vois que les autres représentent mon moi. Ils me trouvent sympathique, agressif, violent, charmant, etc. Quand nous sommes à l'écoute des mouvements des autres envers nous, notre moi réagit, soit par la dimension positive quand les autres semblent reconnaître ce que nous pensons que notre ego est, soit de manière négative lorsque nous pensons qu'ils nous prennent pour ce que notre ego n'est pas.

Le moi est donc présent aussi dans cette relation avec l'autre à la fois parce que je me représente souvent tel que je crois être et non tel que je suis, et que les autres me voient souvent d'une autre façon que la façon dont je me vois moi-même. Très vite, l'ego, afin de garantir une stabilité psychologique intérieure, représente ceux qui sont en train de nous représenter afin de s'en protéger. Ce mouvement automatique crée une double barrière entre moi et l'autre personne si bien que je ne peux jamais accepter l'information comme elle me vient.

Si donc, nous nous rendons compte que sujet et objet sont des représentations et que, loin de nous libérer, les relations avec les autres jouent sur des représentations à plusieurs niveaux, nous avons du mal à cerner ce qu'est ce moi qui ne cesse de représenter, d'intellectualiser, de raisonner et donc de nous couper de la réalité.

[modifier] La représentation est fondée sur le passé

Le moi, tel que mon intellect et mes affects le voient, est une représentation qui, comme toute représentation, s'appuie sur le passé. J'ai en moi, une collection d'expériences que j'ai accumulée, j'ai une certaine éducation, des traditions, un certain conditionnement me faisant voir les choses d'une certaine manière et me faisant avoir un avis sur quasiment tout. Si j'étais né sur un autre continent, il va de soi que mon conditionnement aurait été différent. Ces représentations sont le fruit du passé personnel et collectif. C'est le poids de l'ego. Nous serions même tentés de dire que ce poids est l'ego.

Lorsque mon moi représente les choses nouvelles de la vie, que ce soit par l'intellect ou par les affects, le présent propose une réalité que mon esprit associe automatiquement à une expérience, bonne ou mauvaise. Si un problème intellectuel m'est posé, je vais tenter le résoudre par l'intellect à la lumière de mes expériences passées, de mes connaissances. Quand une situation affective naît, je vais, souvent inconsciemment, garder de cette situation les similitudes que mon ego a trouvées dans mon passé afin de réagir de la même façon que je l'ai toujours fait : par la colère, par l'abattement, par la fuite, par le rire, etc. Tout cela représente mon conditionnement.

Dans le présent, mon ego va donc systématiquement réagir en référence au passé, car le moi est le passé. Aussi, comme nous avons tous tendance à vivre dans le passé du moi, qui est un passé représenté, nous ne voyons le présent que dans la mesure où ce dernier nous rappelle le passé. Notre moi reste donc toujours dans le connu.

Au fur et à mesure du temps, le moi possède suffisamment d'expériences et de savoir pour, du moins le pense-t-il, couvrir à peu près toutes les situations de la vie. Il s'en suit trois mouvements :

  • le moi se sclérose autour de conditionnements réducteurs ;
  • le moi devient hermétique à l'inconnu ;
  • le moi se fige dans une caricature de personnalité.

Reste alors un mécontentement latent du moi qui, bien qu'il ait construit des murs autour de lui, n'est jamais totalement convaincu qu'il a la sécurité absolue. Le moi, en effet, ne voit pas les choses qui sont mais voient les choses qui devraient être. Or, ces choses "telles qu'elles devraient être", sont aussi des projections du passé. Nous voudrions que les choses du présent obéissent à un schéma que nous avons trouvé intéressant, beau, confortable, rassurant, etc., dans le passé ; ou bien nous voudrions que la situation du présent reproduise une situation agréable du passé ; ou encore nous voudrions que la situation du présent ne se produise pas comme une situation de déplaisir du passé ; etc. Dans tous les cas, quand le moi observe et projette "ce qui devrait être", il ne fait que recycler le passé. Souvent, nous nommons cela "intuition", à tort.

Le moi est donc le passé. Il est d'ailleurs intéressant de se poser la question de qui vient en premier : la pensée ou le moi ? Le penseur que le moi crée décide-t-il de penser, ou bien est-ce le contraire, c'est-à-dire la pensée crée le penseur ? La réponse à cette question ne se trouve que dans l'observation de notre propre pensée, une observation attentive et sans jugement.

[modifier] Caractéristiques de la représentation

[modifier] La représentation comme support au conflit intérieur

La représentation est donc la base de notre être. La pensée génère des représentations et devant leur impossibilité à coïncider avec le réel, génère en nous des conflits entre ce qui est (que nous ne souhaitons pas voir) et ce qui devrait être. Ainsi, la pensée nous projette dans le futur, dans un futur où ce qui devrait être serait. De fait, la pensée nous projette dans un conditionnel, ce dernier venant avec son lot d'angoisses si ce que devrait être venait à ne pas être.

Il est nécessaire de bien noter que, quelque soit le type de pensée que nous puissions avoir, cette dernière agit toujours de la même façon. La pensée génère le moi qui divise l'esprit en sujet penseur et objet pensé. Le référentiel de la pensée est le passé (les expériences, les souvenirs, le conditionnement). Le sujet penseur se concentre sur l'objet pensé et y projette des éléments du passé. Ainsi, il raisonne toujours de la même façon.

[modifier] La représentation comme support au conflit extérieur

La nouveauté du présent fait peur au moi qui cherche une stabilité. Ainsi, pour ne pas être "ébranlé dans ses fondements", le moi refuse de voir la nouveauté, cette nouveauté qui pourrait remettre en cause tant de théories, tant de conditionnements ou encore la représentativité de tant d'expériences... Le moi refuse donc la nouveauté. La seule manière pour le moi d'accepter cette nouveauté est de la dégrader, de la représenter au format du passé, de la transformer en un objet connu par lui. Ainsi, tout l'édifice du moi est sauf, mais le conflit est généré dans la mesure où une autre personne peut avoir entrevu la nouveauté de la situation.

Nous avons tous expérimenté l'incommunicabilité de certaines réalités à nos proches, à nos amis, à notre femme ou à notre mari, etc. cette incommunicabilité vient souvent de l'impossibilité du moi à voir le présent, à accepter que ce présent ne rentre pas dans les "cases" du passé. Pour accepter la nouveauté, nous disons souvent que nous avons "besoin de temps", ce qui est absurde. Au contraire, le temps est la substance de l'ego, le temps renforce l'ego. Jamais le temps n'a rendu un ego plus ouvert sur la nouveauté, au contraire.

[modifier] Mesure et comparaison

Notre intellect désire pouvoir jouer avec les grands outils de la pensée :

  • la mesure,
  • la comparaison

Dès lors que l'un de ces deux outils (qui ne sont en fait que les faces d'un même outil) commence son action, l'esprit est divisé. Il a l'illusion d'une activité utile, mais il ne fait que manipuler des représentations. Cette manipulation est centrée sur la relation entre les représentations.

En effet, s'il est trivial de dire que comparer deux représentations implique que mon intellect crée un lien entre ces deux représentations afin de les comparer, il en est de même pour la mesure où mon intellect quantifie ce que je vois afin de le classer ensuite sur une échelle qui me permettra de comparer ces représentations. Mon intellect est donc toujours en train de tirer des "liens" entre des représentations, ces liens étant quantifiables, mesurables, comparables.

Dès lors que mon intellect use de mesure et de comparaison, il simplifie les choses à un deuxième niveau, le premier niveau de simplification étant la représentation elle-même. Il représente les liens entre les représentations en les quantifiant.

Cette quantification est le fruit de notre passé


[modifier] Notes

La juste représentation de l'esprit :

  • une masse de gelée avec des canaux câblés en dur empêchant tout raisonnement différent ;
  • un océan avec des vagues et des templates de vagues ; quand l'océan est calme, on peut voir le fond (l'âme).

La juste de présentation du corps :

  • une rivière : l'eau qui passe indique que c'est toujours la même rivière mais qu'elle est à la fois :
    • toujours différente (ce n'est pas la même eau) ;
    • matérielle (et reconstituée).

La juste représentation de la réincarnation :

  • le reflet dans un miroir : c'est le même homme (âme) mais son reflet ne dure que tant qu'il est devant le miroir ; après le reflet disparaît ; un nouveau reflet sera toujours le reflet de la même personne mais pas le même reflet.

A mettre en perspective avec les représentations scientifiques actuelles :

  • dualité onde corpuscule (idem cercle ou rectangle ? en fait cylindre).