L'obsession française de l'islam

Un article de Caverne des 1001 nuits.

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A la fin du XXème siècle, on ne traite pas de l'athéisme en tant que tel, mais de la laïcité. Nous sommes toujours dans cette confusion française universaliste : si nous défendons l'athéisme, nous ne pouvons pas être universalistes ; donc nous défendons la laïcité, principe d'un Etat n'ayant pas de lien avec les autorités religieuses. Dans les faits, derrière le mot "laïcité", les intellectuels défendent l'athéisme comme religion d'Etat. A la fin du XXème siècle, on ne traite pas de l'athéisme en tant que tel, mais de la laïcité. Nous sommes toujours dans cette confusion française universaliste : si nous défendons l'athéisme, nous ne pouvons pas être universalistes ; donc nous défendons la laïcité, principe d'un Etat n'ayant pas de lien avec les autorités religieuses. Dans les faits, derrière le mot "laïcité", les intellectuels défendent l'athéisme comme religion d'Etat.
-Ce discours +Ce glissement a certaines conséquences comme une interprétation très partiale de la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat de 1905. Par exemple, les manifestations religieuses de groupe sont parfaitement autorisées par la loi<ref>[http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/eglise-etat/sommaire.asp#loi Texte de la loi de 1905].</ref>, mais elles sont critiquées par les tenants de l'athéisme qui voudraient que la la religion soit ''invisible'' et qu'elle reste dans le strict cadre privé ou dans le cadre des réunions dans les bâtiments du culte réservés à cet effet.
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 +Historiquement, cette séparation est objectivement très importante pour l'Etat français et elle déchaîne les passions. Il est possible d'y voir la deuxième étape de la construction d'un état séculier, le premier étant l'abolition de la royauté, le second étant la rupture des liens privilégiés avec l'Eglise de Rome. Cette étape est majeure dans la division des responsabilités entre Etat français et organisations religieuses. C'est cette même loi de 1905 qui permet de réglementer l'exercice des cultes sur le territoire français et qui est un atout
=== L'émergence de l'islam en terre athée === === L'émergence de l'islam en terre athée ===

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Sommaire

Introduction

Force est de constater que la France est devenue obsédée de l'islam. Que ce soit à gauche ou à droite, les discours anti-islamiques se sont généralisés dans le mépris le plus profond des vérités fondamentales de l'islam de France et de l'islam en général.

Nous allons, dans cet article, tenter de donner des pistes sur le pourquoi d'une telle obsession.

Du racisme à l'anti-islam, un transfert réussi

Le déclencheur du changement

L'islam, en tant que tel, n'est devenu un problème de société en France que depuis les attentats de 1995 en France puis ceux du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis. Auparavant, les campagnes partisanes du type "Touche pas à mon pote" visaient le racisme (quand ils ne le suscitaient pas) mais pas l'islam. Les médias français, postérieurement au 11 septembre et en phase avec les médias américains, ont préparé les opinions publiques à la "vengeance légitime contre le terrorisme" et ont préparé les interventions militaires en Afghanistan et en Irak.

A partir de ce moment, un glissement a eu lieu dans la rhétorique raciste anti-arabe. Cette dernière s'est transformée en une position contre l'islam, position beaucoup plus politiquement correcte que la position raciste classique, objectivement indéfendable au grand jour.

Un glissement sémantique qui plaît à gauche comme à droite

S'il est raciste de "ne pas aimer" les arabes, il n'est pas raciste de ne pas aimer l'islam. L'islam est donc devenu le bouc émissaire facile car il est issu d'un transfert xénophobe très classique, transfert de la peur de l'autre vers la peur de la religion de l'autre. Le premier mouvement est interdit ou au moins réputé mauvais ; le second, lui, est parfaitement "acceptable", qui plus est dans une rhétorique des droits de l'homme (vus par les intellectuels français).

Le raisonnement devient vite caricatural et fait appel à l'assimilation : islam = burqa = esclavage des femmes = terrorisme. Ce raisonnement permet une posture intellectuelle : "nous, intellectuels républicains universalistes, nous sommes contre l'islam". L'islam est donc devenu le moyen pour les intellectuels d'accepter une xénophobie en la maquillant en défense des droits de l'homme.

Bien entendu, pour que le combat demeure "vivant", il est nécessaire que l'ennemi soit vivant mais qu'il ne puisse pas s'exprimer. Tariq Ramadan est l'un des intellectuels victime de ce grand cirque médiatique : on interdit ses conférences en France mais on continue à le critiquer par contumace sans pour autant lui donner de droit de réponse[1]. Or, dans le pays des débats, même si l'on est pas d'accord avec lui, la démocratie voudrait qu'on l'écoute. Il en va de même avec les responsables des associations musulmanes. Force est de constater qu'ils ne sont souvent pas les plus charismatiques ou les communicants les plus à l'aise pour faire la lumière sur ce qui est vrai et ce qui est faux dans la représentation de l'islam en France[2].

Les intellectuels "engagés", nous le savons, ont besoin d'un ennemi vivant pour exister, car ils n'existent le plus souvent que dans la division. Cet ennemi leur sert à montrer à quel point ils sont "combatifs" et "engagés" et leur permet de projeter leurs propres fantasmes.

L'islam ravive de vieilles obsessions anticléricales françaises

La névrose collective originelle française

Derrière tout déchaînement anormal de passions, il est nécessaire de chercher une origine. La France n'étant pas a priori un pays très raciste (ceux qui n'en sont pas convaincus pourront aller aux Etats-Unis pour s'en rendre compte), la passion anti-islam va beaucoup plus loin dans sa persistance et dans sa violence que le simple transfert xénophobe ne pourrait l'expliquer.

Nous devons pour expliquer ce phénomène revenir quelques siècles en arrière. L'inconscient collectif français s'est bâti sur la révolution sanglante de 1789.

Il en est résulté des névroses collectives d'une force très importante (et dont des articles de ce site traitent). Les zones conscientes de ces névroses embellissent la Révolution, lui donnant un air de libération politique, de liberté, de droits de l'homme, de libération du joug de la religion, un accent universaliste[3]. La violence et la division sont passées sont silence, oubliées, refoulées, tout comme est refoulé l'Empire qui succède à cette révolution en proposant un autre paradigme.

L'ennemi intérieur : l'Eglise Romaine

Depuis lors et jusqu'à la fin du XXème siècle, l'ennemi intérieur de la France a été l'Eglise Romaine. Quand d'autres pays faisaient une fixation sur les juifs, la France faisait une fixation sur la destruction de l'Eglise Romaine en France. La lecture des documents d'époque montre à quel point l'Eglise catholique est devenue en quelques temps la cible de toutes les attaques les plus violentes (au sens propre). Déjà la cible privilégiée des révolutionnaires, elle devient l'ennemi de tous les intellectuels qui vont chercher à détruire par tous les moyens toutes ses dimensions : ses dogmes, sa spiritualité, ses possessions, ses ordres, son influence dans la vie des gens.

Nous ne chercherons pas à justifier ou à critiquer cette posture des intellectuels de l'époque, mais force est de constater que les fondations de l'Etat français sont établies dans un combat très violent contre l'Eglise.

Le fait est qu'au vingtième siècle, l'anticléricalisme semble avoir "abattu" l'ennemi intérieur : les nouvelles générations sont athées par défaut, l'école est très largement athée militante, les liens entre l'Eglise et l'Etat ont quasiment disparus, les églises sont vides (certaines d'ailleurs ont été récupérées par les mairies à des fins non religieuses), les bâtiments religieux sont devenus des "monuments historiques" (preuve de leur inscription dans le passé) et les catholiques, presque opprimés, se sont faits discrets à force d'être conspués. Les théories philosophiques les plus matérialistes peuvent donc se développer sans ennemi[4].

De la laïcité à l'athéisme, nouveau glissement sémantique

A la fin du XXème siècle, on ne traite pas de l'athéisme en tant que tel, mais de la laïcité. Nous sommes toujours dans cette confusion française universaliste : si nous défendons l'athéisme, nous ne pouvons pas être universalistes ; donc nous défendons la laïcité, principe d'un Etat n'ayant pas de lien avec les autorités religieuses. Dans les faits, derrière le mot "laïcité", les intellectuels défendent l'athéisme comme religion d'Etat.

Ce glissement a certaines conséquences comme une interprétation très partiale de la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat de 1905. Par exemple, les manifestations religieuses de groupe sont parfaitement autorisées par la loi[5], mais elles sont critiquées par les tenants de l'athéisme qui voudraient que la la religion soit invisible et qu'elle reste dans le strict cadre privé ou dans le cadre des réunions dans les bâtiments du culte réservés à cet effet.

Historiquement, cette séparation est objectivement très importante pour l'Etat français et elle déchaîne les passions. Il est possible d'y voir la deuxième étape de la construction d'un état séculier, le premier étant l'abolition de la royauté, le second étant la rupture des liens privilégiés avec l'Eglise de Rome. Cette étape est majeure dans la division des responsabilités entre Etat français et organisations religieuses. C'est cette même loi de 1905 qui permet de réglementer l'exercice des cultes sur le territoire français et qui est un atout

L'émergence de l'islam en terre athée

Références

  1. Cf. Quand le gouvernement français censure
  2. On notera que, pendant cette campagne présidentielle, la distinction a été faite entre "islam de France" et "islam en France", comme si les deux notions devaient être séparées et la première était forcément meilleure que la seconde. Prenons le catholicisme : une telle distinction est-elle de mise ?
  3. Cf. L'obsession névrotique française de l'universalité.
  4. Reste le combat de quelques intellectuels qui, pour nous montrer qu'ils sont vraiment sérieux, continuent à faire montre d'un anticléricalisme de posture.
  5. Texte de la loi de 1905.


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