Rubayat, par Omar Khayyâm, quatrains LXI à LXX

Un article de Caverne des 1001 nuits.

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LXI
Du bonheur, nous ne connaissons que le nom.
Notre plus vieil ami est le vin nouveau.
Du regard et de la main, caresse notre seul bien
Qui ne soit pas décevant : l'urne pleine du sang de la vigne.


LXII
Le palais de Bahrâm est maintenant le refuge des gazelles.
Les lions rôdent dans ses jardins où chantaient des musiciennes.
Bahrâm, qui capturait les onagres sauvages,
Dort maintenant sous un tertre où broutent des ânes.


LXIII
Ne cherche pas le bonheur. La vie est aussi brève qu'un soupir.
La poussière de Djemchid et de Kaï-Kobad tournoie dans le poudroiement vermeil que tu contemples.
L'univers est un mirage.
La vie est un songe.


LXIV
Va t'asseoir, et bois! Tu jouiras d'un bonheur que Mahmoud n'a jamais connu.
Écoute les mélodies qu'exhalent les luths des amants :
Ce sont les vrais psaumes de David. Ne plonge ni dans le passé ni dans l'avenir.
Que ta pensée ne dépasse pas le moment! C'est le secret de la paix.


LXV
Les hommes bornés ou orgueilleux
Etablissent une différence entre l'âme et le corps.
Moi, je n'affirme qu'une chose :
Le vin détruit nos soucis et nous donne la quiétude parfaite.


LXVI
Quelle énigme, ces astres qui bondissent dans l'espace !
Khayyâm, tiens solidement la corde de la Sagesse.
Prends garde au vertige qui fait tomber,
Autour de toi, tes compagnons!


LXVII
Je ne crains pas la mort.
Je préfère cet inéluctable à l'autre qui me fut imposé lors de ma naissance.
Qu'est-ce que la vie ?
Un bien qui m'a été confié malgré moi et que je rendrai avec indifférence.


LXVIII
La vie passe, rapide caravane !
Arrête ta monture et cherche à être heureux.
Jeune fille, pourquoi t'attristes-tu ?
Verse-moi du vin ! La nuit va bientôt venir...


LXIX
J'entends dire que les amants du vin seront damnés.
Il n'y a pas de vérités, mais il y a des mensonges évidents.
Si les amants du vin et de l'amour vont en Enfer,
Le Paradis doit être vide.


LXX
Je suis vieux. Ma passion pour toi me mène à la tombe,
Car je ne cesse de remplir de vin de dattes cette grande coupe.
Ma passion pour toi a eu raison de ma raison.
Et le Temps effeuille sans pitié la belle rose que j'avais...


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