Rubayat, par Omar Khayyâm, quatrains CXLI à CL

Un article de Caverne des 1001 nuits.

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CXLI
Contente-toi de savoir que tout est mystère : la création du monde et la tienne, la destinée du monde et la tienne.
Souris à ces mystères comme à un danger que tu mépriserais.
Ne crois pas que tu sauras quelque chose quand tu auras franchi la porte de la Mort.
Paix à l'homme dans le noir silence de l'Au-Delà !


CXLII
Au milieu de la prairie verte, l'ombre de cet arbre ressemble à une île.
Passant, reste où tu es, là-bas !
Entre la route que tu suis et cette ombre qui tourne lentement,
Il y a peut-être un abîme infranchissable.


CXLIII
Que ferai-je, aujourd'hui ? Irai-je à la taverne ?
Irai-je m'asseoir dans un jardin, ou me pencherai-je sur un livre ?
Un oiseau passe. Où va-t-il ? Je l'ai déjà perdu de vue. Ivresse d'un oiseau dans l'azur torride !
Mélancolie d'un homme dans l'ombre fraîche d'une mosquée!


CXLIV
Un peu plus de vin, ma bien-aimée !
Tes joues n'ont pas encore l'éclat des roses.
Un peu plus de tristesse, Khayyâm !
Ta bien-aimée va te sourire.


CXLV
Notre univers est une tonnelle de roses. Nos visiteurs sont les papillons.
Nos musiciens sont les rossignols.
Quand il n'y a plus ni roses, ni feuilles,
Les étoiles sont mes roses et ta chevelure est ma forêt.


CXLVI
Serviteurs, n'apportez pas les lampes puisque mes convives, exténués, se sont endormis.
J'y vois suffisamment pour distinguer leur pâleur.
Étendus et froids, ils seront ainsi dans la nuit du tombeau.
N'apportez pas les lampes, car il n'y a pas d'aube chez les morts.


CXLVII
Quand tu chancelles sous le poids de la douleur,
Quand tu n'as plus de larmes, pense à la verdure qui miroite après la pluie.
Quand la splendeur du jour t'exaspère,
Quand tu souhaites qu'une nuit définitive s'abatte sur le monde, pense au réveil d'un enfant.

CXLVIII
Je dissimule ma tristesse,
Puisque les oiseaux blessés se cachent pour mourir.
Du vin ! Écoutez mes plaisanteries !
Du vin, des roses, des chants de luth et ton indifférence à ma tristesse, bien-aimée !


CXLIX
Seigneur, tu as placé mille pièges invisibles sur la route que nous suivons,
Et tu as dit: "Malheur à ceux qui ne les éviteront pas!"
Tu vois tout, tu sais tout. Rien n'arrive sans ta permission.
Sommes-nous responsables de nos fautes ? Peux-tu me reprocher ma révolte ?


CL
J'ai beaucoup appris et j'ai beaucoup oublié aussi, volontairement.
Dans ma mémoire, chaque chose était à sa place. Par exemple, ce qui était à droite ne pouvait aller à gauche.
Je n'ai connu la paix que le jour où j'ai tout rejeté avec mépris.
J'avais enfin compris qu'il est impossible d'affirmer ou de nier.


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