Histoire VI

Un article de Caverne des 1001 nuits.

Version du 29 juillet 2007 à 17:27 par 1001nuits (Discuter | Contributions)
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Fatigué par les marches qui s'enchaînaient d'une façon déplacée, je décidai de m'arrêter au milieu de l'escalier. On n'a pas idée d'habiter si haut !
Je laissai mes mains s'amuser entre elles, lorsque j'entendis du bruit à l'étage supérieur. Aucun son ne venait troubler cette dispute parasite car la minuterie était depuis longtemps éteinte. Une banale scène de ménage. Avec balais, aspirateur et tout le tintouin. Néanmoins, des sons stridents s'échappaient par moments et, bien que n'étant pas un spécialiste, j'aurais juré qu'il s'agissait d'un four à repasser. Après quelques secondes de réflexion, je grimpai les marches qui restaient et frappai à la porte.
— C'est le réparateur, m'entendis-je claironner.
— J'arrive.
La voix était douce et bien fondue dans les bruits divers qui perçaient les murs d'une multitude de petits trous. Le son strident, lui aussi, s'interrompit un instant pour admirer l'irruption d'une si charmante voix.
La porte s'ouvrit et une créature plus qu'agréable apparut comme par miracle. Je tentai, libertin :
— C'est votre four à repasser qui fait tout ce raffut ?
Elle prit un air gênée et rougit.
— Entrez sinon mes voisins vont nous espionner.
En franchissant le seuil de la maison, je les imaginais, bavant en imaginant un nouveau sujet de conversation.
— Il est vrai que les gens sont à l'affût du moindre rien qui pourrait les faire parler. Les sujets de conversation se font rares...
— Vous trouvez ? demanda-t-elle en me guidant vers la machine qui hurlait à mon approche. Pensez-vous pouvoir la soigner ?
— La " réparer ", je préfère. C'est plus technique.
Elle me regarda d'un air dubitatif.
— Ne vous inquiétez pas ; je suis un spécialiste.
L'air rassuré, elle regarda ce que cette machine commune avait dans le ventre et elle posait des questions de temps en temps. C'est quoi cette pièce ? A quoi sert ce petit voyant ? Est-il cassé ? Comment vous appelez-vous ? Comment ça " comment vous appelez-vous " ?
— Herbert, répondis-je étonné.
— Oui, mais vous n'avez pas de numéro ?
— Bien sûr que si mais, entre nous, cela peut suffire.
— Aimez-vous votre métier ?
— Vous savez, je suis né avec des outils dans les mains. Réparer, c'est mon truc. Par contre, les mauvaises langues prétendent que je suis un peu simple, alors bien sûr, je n'ai pas le droit de toucher aux machines automatiques...
— Vous n'êtes pas si mal.
Je ne la regardais plus de peur de ne pas résister à la furieuse envie que j'avais de me cacher sous un meuble. Je continuais les réparations et lorsque j'eus terminé, j'eus l'impression qu'une poutre me tombait sur le coin de la figure. J'embrassai Morphée d'une manière qui, ma foi, aurait pu être un peu plus agréable.
Lorsque je m'éveillai, elle me regardait un reste de peur dans les yeux.
— Qu'est-il arrivé ?
— Je vous ai assommé. Et l'heure du couvre-feu est dépassée. Vous êtes donc obligé de rester ici jusqu'à demain matin.
Voyant mon air déconcerté, elle prit ma moue pour un signe de contrariété et s'enquit de ma situation familiale.
— Vous n'êtes pas marié ? demanda-t-elle affolée.
Je fis un signe de la tête indiquant que non alors que le sentiment d'être attaché sur une chose qu'on aurait pu appeler un lit grandissait en moi. Je tentai de bouger le bras et réalisant que cela était impossible, je lui demandai s'il lui paraissait normal de se retrouvé attaché sur un lit à une heure pareille chez des gens qu'on ne connaissait pas.
— Je suis bien obligée. C'est par sécurité.
— Mais que voulez-vous dire ?
— Mon mari s'est fait enlever et ils demandent quelqu'un pour l'échange. J'ai conclu, à vous voir, que vous pourriez tout à fait représenter un objet d'échange facile à valoriser.
— Vous êtes folle, hurlai-je presque malgré moi. Vous allez me livrer à des terroristes ?
Elle allait répondre quand des bruits de craquements envahirent soudain la pièce que je jugeais être le hall d'entrée. Une foule fit irruption dans la chambre avec des cris agressifs et je reconnus les voisins bavant et hargneux. Des injures furent prononcées à notre endroit nous traitant de jules, putain, adultère et autres fornicataires. Rapidement, les moralistes nous eurent roués de coups, puis tués.
Je me suis réveillé dans cet endroit et, depuis que j'y ai atterri, je ne cesse de chercher la coupable pour, qui sait, faire un peu mieux connaissance.


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