Après les manifestations anti-CPE, un plaidoyer pour la démocratie

Un article de Caverne des 1001 nuits.

Version du 26 avril 2009 à 15:11 par 1001nuits (Discuter | Contributions)
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La France a perdu la tête, car quand la loi veut se faire dans la rue, il n'y a plus de démocratie mais des réactions irrationnelles.

Que les manifestations cessent, que la pression sur le gouvernement se relâche, ce gouvernement dont le président a été élu à 80% des voix doit mener sa politique comme l'exige la démocratie dans laquelle nous vivons, que nous soyons ou pas d'accord avec elle.

Sommaire

[modifier] Il y a un temps pour les gouvernants et un temps pour voter

A chaque tentative de réforme, c'est la même chose : des manifestants tentent de changer le fonctionnement de la démocratie, de pousser pour une décision incompatible avec les choix des électeurs qui se déplacent aux urnes, alors que la plupart ne vont pas même voter. Qui sont ces gens ? Par qui sont-ils manipulés, harangués ? Quelle est leur légitimité ? Personnellement, je n'ai pas voté pour eux.

On m'objectera : « nous étions obligés de voter pour Chirac ». Je répondrai : « c'est le jeu de la démocratie », et pourtant je ne porte pas ce dernier dans mon cœur.

Si vous n'êtes pas contents du CPE, ne votez pas Villepin en 2007 ! Votez autre chose, votez gauche ou extrême gauche ! Mais laissez le gouvernement faire son travail, laissez les responsables faire leur travail, adroitement ou maladroitement peu importe, laissez-les faire ce que font nos voisins européens : tenter des choses pour faciliter l'emploi.

[modifier] Contestation désastreuse

La méthode contestataire française est désastreuse. Nous sommes la risée du monde, car nous avons le toupet de défendre nos principes démocratiques comme les meilleurs du monde, notre beau concept d'intégration, par exemple, qui semble légitimer des discours islamophobes. Nous bafouons, à chaque nouvelle occasion, les principes de base de la démocratie dont nous avons été les premiers constructeurs.

Halte au sketch ! Halte au mensonge ! Halte à la langue de bois, des politiques d'abord, mais aussi de la rue ! La rue, championne de la morale, championne de l'économie, la rue qui veut gouverner, la rue qui se ment, la rue qui raconte des bêtises, qui se rallie dans des combats absurdes contre les « méchants de droite » (après avoir exclu du pouvoir les « méchants de gauche »), croyant que le monde entier se ralliera à la vision du « bonheur fonctionnaire » à la française.

Il y a quelques temps, les mêmes manifestants descendaient dans la rue pour « contrer » Le Pen, alors qu'ils n'allaient même pas voter, qu'ils n'étaient pas même inscrits sur les listes électorales ! Mais ils avaient le droit de donner des leçons de morale aux votants !

Là, c'est la même chose : ils veulent contrer un projet de loi alors qu'ils n'ont jamais travaillé et rêvent que le privé offre une sécurité accrue identique au service public.

[modifier] La logique de la peur

Derrière tout cela, on trouve la peur de ce qu'on ne connaît pas, toujours la peur, la peur qui fait faire n'importe quoi, dans le racisme, la xénophobie, l'homophobie ou l'emploi. On ne connaît pas, alors on a peur au lieu de se renseigner. On a peur alors « on lutte ». On lutte mais contre quoi ? Contre des fantômes, on lutte contre les autres sur lesquels on projette nos peurs.

Il y a quelques temps, les méchants étaient les islamistes, aujourd'hui les méchants sont les « méchants patrons » et les « vilains de droite ». Souvenons-nous que des « méchants de gauche » qui ont été chassés par les urnes de leurs responsabilités gouvernementales. Il faut un ennemi, et cet ennemi n'est qu'un fantasme.

La peur, il faut la cristalliser sur quelqu'un ou quelque chose de très vilain, qu'on ne connaît pas. Aujourd'hui, c'est le CPE, demain, nous réactiverons la peur de la « Mondialisation », monstre sanguinaire absolu, genre de croque-mitaines moderne. Nous en avons en stock des générateurs de peurs absurdes qui rendent les gens cons et les font descendre en troupeaux dans la rue. On pourrait citer Bush ou l'Iran ou la dernière réforme (qui est toujours horrible), etc. Peu importe le sujet finalement, pourvu qu'on ait un ennemi.

Nous nageons en plein irrationnel. La France a des atouts qu'elle spolie tous les jours un peu plus, grâce à un superbe mépris de soi et une tendance toujours plus grave au combat de ses parties les unes contre les autres. Division et affrontement : voilà quels sont les piliers français !

[modifier] Loin des réalités

Je travaille dans une société dans laquelle le CPE pourrait être un moyen de ne pas aller vers la délocalisation massive en Inde, mais tout le monde s'en fout, en fait, les politiques comme leurs miroirs contestataires aveugles de la rue.

Qu'on en finisse avec la langue de bois ! Que veulent les « patrons très méchants » (CPE ou pas) ? Ils veulent avoir deux ans de période d'essai pour être certains que la personne qu'ils embauchent n'est pas un branleur, hé oui... Car un branleur en CDI dans une PME de cinq personnes mène la PME au dépôt de bilan : on ne peut pas la virer à cause du droit du travail français, et elle coûte très cher. Et des branleurs, il y en a un paquet de nos jours. Voilà la réalité : elle est si simple.

Quand on a ramé pour avoir un premier emploi, on voit ces scènes de manifestations surréalistes avec un peu de tristesse. Ah bien sûr, on ne manifeste pas quand on est salarié, en tous cas du privé, donc on n'a pas de poids dans les médias, on subit et on attend les urnes.

Le monde n'est plus le même, on peut le déplorer ou s'y adapter. Nous ne passons plus toute notre carrière dans la même société, et pas seulement parce qu'on s'en fait virer, aussi parce qu'on va voir ailleurs.

[modifier] Dans un an, les élections : exprimez-vous !

Dans un an, les manifestants pourront aller sanctionner le gouvernement qui a mis sur pieds un projet de loi qui ne leur va pas, dans les urnes, comme tout le monde. Dans un an, en leur âme et conscience, dans le silence de l'isoloir, ils choisiront le nom du prochain président.

D'ailleurs, si on réfléchit bien et qu'un président de la République de gauche passe en 2007, son projet politique comportera naturellement la suppression du CPE, CPE qui aura été « mis en place » à l'hiver 2006 et donc, dont les conditions d'applications auront été retardées pour cause d'élections.

Bref, beaucoup de bruit pour rien.

[modifier] Conclusion

La France de la bagarre et de la morale est pitoyable, en politique comme dans la rue.

Ceux qui manifestent devraient regarder le marché actuel de l'emploi, car la vraie précarité, c'est le chômage, et il est là, aujourd'hui, hic et nunc.

En le prenant pour prétexte à un nouvel affrontement, on cultive la précarité de la pensée, une exception bien française celle-là, faite des tabous les plus divers, un mode de penser qui envisage le monde comme source de peur et ne fait que vanter le statisme le plus complet.