Apologie du plaisir féminin

Un article de Caverne des 1001 nuits.

Nota bene : cet article est déconseillé au moins de 18 ans.

Cet article traite d'un sujet encore assez tabou, du moins en France, le plaisir féminin. Le but est de remettre le plaisir sexuel de la femme au centre du débat faussé sur l'érotisme et la sexualité en général.

«On tient un homme par le ventre et le bas-ventre». Cet adage de grand-mère est encore profondément ancré dans les esprits de beaucoup de femmes qui sont, souvent inconsciemment, les complices de leur positionnement en objet sexuel pour l'homme, envisagé de façon archétypale. Nous allons explorer, au cours de cet article, quelques uns des travers de l'« inconscient collectif sexuel » et voir comment la sexualité féminine peut devenir terne, voire désagréable, ou au contraire anormalement débridée, lorsqu'un certain nombre de facteurs inconscients se présentent dans les représentations psychiques de la femme et de l'homme.

Il n'est point question ici de faire procès de l'un ou de l'autre des sexes, car toute généralisation dans ce domaine serait une erreur grossière, mais plutôt de remettre en perspective d'une façon claire et parfois explicite les responsabilités de chacun dans la représentation et la pratique de la sexualité. Le but premier de cet article est, en ce sens, de donner des éléments pour que les gens fâchés avec la sexualité retrouvent l'espoir d'un abord sain de la chose sexuelle.

Sommaire

Un petit historique des générations passées

Nous ne critiquerons pas le féminisme en général. Au contraire, nous dirons que le monde actuel manque de féminisme, et que bon nombre de revendications féministes d'hier, pour la plupart datant de moins d'un demi-siècle, ont été injustement oubliées par les femmes d'aujourd'hui.

S'il est difficile de donner des réponses globales au pourquoi de l'oubli actuel du féminisme par les femmes elles-mêmes, deux principaux éléments de réponse peuvent néanmoins être apportés :

  • la majeure partie des femmes nées après 1965 ne fut jamais éduquée aux bases des idées féministes ;
  • le féminisme devint rapidement une caricature de lui-même en allant jusqu'à véhiculer des idéaux lesbiens.

Notons que n'avons rien à reprocher aux idéaux lesbiens, mais que lors de la prise de contrôle d'un mouvement féministe par un état major à tendances lesbiennes, nous comprenons le dépit idéologique dans lequel se sont retrouvées beaucoup de femmes hétérosexuelles, recherchant les moyens de la libération du « joug masculin » sans pour autant vouloir devenir homosexuelles.

Il est intéressant de constater que la génération du « baby boom », qui connut, théoriquement du moins la « libération sexuelle », n'a, majoritairement, pas rempli ses grands objectifs concernant l'éducation sexuelle de ses enfants. Ainsi, après la révolte de 68 contre l'« establishment bourgeois », les anciens de 68 reconvertis dans la nouvelle classe moyenne ne semblent pas avoir fait mieux que leurs parents si décriés en matière d'éducation sexuelle. La sexualité « libre » est restée tabou et a été tuée dans l'œuf par l'apparition du sida dans les années 80. Le sexe est redevenu « mauvais », comme au bon vieux temps du catholicisme.

Certes, comme toujours, la représentation du sexe rendu « mauvais » et « tabou » par la société génère des contre-courants qui, toujours à la recherche de surenchère dans la transgression, postulent la déviance sexuelle comme la nouvelle norme. Seuls les naïfs pourront le laisser avoir à cette approche intellectuelle et conjoncturelle du sexe, à cette illusion de « nouveauté » dans la sexualité et à ces déviances bien misérables, indignes le plus souvent des folies consternantes d'un Sade.

On pourra se référer à l'histoire de France pour vérifier que, quand la publicité autour de la sexualité accepte la déviance et la postule comme bonne, le niveau général de la représentation de la sexualité dans la société est voisin du catastrophique. Nous en sommes là, nageant dans la mode de la fausse transgression qui, si elle permet à quelques uns de briller dans les salons, ne résout pas la misère sexuelle dans laquelle se trouvent bon nombre de nos concitoyens et de nos concitoyennes.

Quant à penser aux nouvelles générations qui découvrent leur sexualité, il suffit de regarder leurs pratiques amoureuses pour être on ne peut plus inquiets. Si la génération du « baby boom » n'a pas tenu ses promesses, il semble que la génération suivante soit si bloquée sexuellement qu'elle ne pense même pas que ses enfants puisse un jour avoir une vision « non pervertie » de la sexualité[1]. En matière de sexualité, si Freud reste d'une actualité brûlante, c'est que malheureusement, plus les choses changent et plus elles restent identiques.

L'homme archétypal vu par le féminisme

Nous commencerons cet exposé par une petite analyse de l'inconscient collectif féminin actuel, celui des femmes de la génération 65-80[2]. Cet inconscient collectif commence par une vision archétypale de l'homme qui a le bon goût d'être l'intersection entre la représentation féministe de l'homme comme « bête assoiffée de sexe » et la représentation de la génération des parents des « baby boomers » de l'homme « qui va aux putes et au bistrot dès qu'il a trois sous ».

L'homme archétypal est vu par l'œil féministe comme le «mâle». Caricaturé à l'extrême, l'homme est représenté comme une «machine à baiser», pour reprendre l'expression, bien navrante, de Bukowski. Obsédé du «ventre», du fait de manger - symboliquement de « se remplir » - et du «bas-ventre» - du sexe - les hommes sont représentés comme préoccupés principalement par manger et par faire l'amour. De plus, la manière commune pour l'homme de faire l'amour est, elle aussi, représentée de manière caricaturale dans la vision féministe comme l'acte visant à se «vider» les testicules, pour ne pas employer d'autres formules plus grossières.

L'homme doit faire l'amour pour se « soulager », ce qui explique la pression que les hommes exercent continuellement sur les femmes en vue de l'obtention de leurs faveurs sexuelles. La femme est obligée, dans ce mode de représentations, de se transformer en un objet sexuel permettant à l'homme d'assouvir ses pulsions les plus basses, ce dernier devenant absent dès lors que le « ventre » ou le « bas-ventre » ne sont plus concernés (éducation des enfants, tâches ménagères, etc.). L'homme est vu comme une « bête ».

Cette représentation archétypale a des avantages (et c'est pour ces avantages qu'elle a été colportée) mais elle a aussi de nombreux inconvénients dont la plupart paraissent invisibles aux membres des courants féministes eux-mêmes.

Avantages de la représentation de l'homme archétypal

L'usage de la nuance passe l'oubli de toutes les formules du type : « tous les X sont comme ça. En matière de sexualité, il est obligatoire de nuancer si l'on ne veut pas dire beaucoup de grosses bêtises.

La représentation archétypale de l'« homme bête » a pour objectof de protéger un certain nombre de jeunes filles des désirs incontrôlables des hommes. Cette représentation a, en effet, l'« avantage » de décrire assez bien une certaine catégorie d'hommes. Pour ces derniers en effet, la sexualité est le principal cœur des préoccupations et le simple fait de « sortir » avec une femme implique nécessairement que cette dernière accepte, après des sommations explicites ou des pressions psychologiques implicites, à accepter des « assauts » sexuels nombreux et fréquents[3].

Dans cette représentation caricaturale, c'est l'immense égoïsme de l'homme qui est décrit comme monstrueux, égoïsme qui pervertit la relation sexuelle avec la femme pour en faire uniquement une recherche de l'assouvissement du plaisir masculin, sans considération pour le plaisir de la femme, mais aussi sans considération pour sa douleur, ce qui est immensément plus grave.

Cette représentation, si elle peut s'appliquer à certains hommes (dont certains possèdent des troubles graves de la sexualité et ou du comportement et restent pourtant sans suivi psychologique) génère le plus souvent une « peur de l'homme a priori ». Or, comme nous allons le voir dans le reste de l'article, quand la représentation de l'homme fait peur, c'est la femme qui est la victime non de la réalité, mais de la peur qu'elle a développé en elle et qui lui change la perception de la réalité.

Problèmes liés à la représentation archétypale de l'homme

Nous exposerons deux grands types de problèmes que les femmes peuvent avoir si elles ont suffisamment intériorisé la représentation archétypale de l'homme comme « assoiffé de sexe ».

Le premier grand type de problème est la difficulté, pour la plupart d'entre elles, de reconnaître un homme différent. Car intérioriser la caricature masculine revient à projeter sur tous les hommes le fantôme de la bestialité sexuelle. C'est donc un acte qui a pour nature de déformer la réalité dans la mesure où tous les hommes sont suspectés d'être des « bêtes ».

Il en résulte une suspicion chronique de la part de certaines femmes qui n'arrivent pas à « croire » que l'homme qu'elles ont en face d'elle ne souhaite pas seulement les utiliser comme un objet sexuel. Cette vision des relations homme femme peut poser rapidement un problème de stabilité de la relation, du fait même de la femme et de sa vision erronée de l'homme. Concrètement, cette dernière sera sur ses gardes, et attendra le moment où « l'homme se dévoile enfin », le plus souvent pour le fuir. Bien entendu, l'homme suivant, après la « belle phase » du « début », éveillera, en elle, le même type de comportements de méfiance et souvent la même issue.

Cette relation à l'homme peut facilement tourner à une certaine attente paranoïaque de la part de la femme d'être finalement « abusée » et dégradée, et une satisfaction à l'être si par hasard le fait arrive (masochisme). Le plus souvent, un traumatisme sexuel est responsable de cette tendance à la déformation de la réalité (viol, inceste, violences sexuelles conjugales passées, etc.).

La représentation archétypale de l'homme comme une bête assoiffée de sexe est donc un moyen commode pour ces femmes traumatisées de projeter le mal qui leur a été fait en projetant leur peur sur tous les hommes. Ce comportement est un trait classique de la « défense » de la névrose qui préfère mettre en place des mécanismes de fuite au lieu d'entamer le travail psychanalytique nécessaire à résorber le traumatisme[4].

La deuxième conséquence de cette vue archétypale de l'homme bestial est, elle, beaucoup plus pernicieuse, dans la mesure où elle est très répandue et dessert fortement les femmes dans le fait d'assumer ou de vouloir assumer leur plaisir.

En effet, pour beaucoup de femmes, l'homme est toujours en instance de devenir une bête assoiffée de sexe (nous verrons plus loin quelques éléments de libido masculine pour éclairer cet état de faits). En un sens, ces femmes n'ont pris que le mauvais côté de la revendication féministe, par ailleurs très légitime dans beaucoup de dimensions. Il en résulte que, s'imaginant artificiellement toujours dans un combat contre la bête sexuelle incarnée dans l'homme, mais incapables de prendre les résolutions féministes de « résister au pouvoir masculin », elles se positionnent elles-mêmes en objets sexuels pour limiter les risques, pour les anticiper. Pire que cela, elles s'auto-conditionnent la plupart du temps à tolérer l'homme sexuellement bestial (qui peut-être d'ailleurs n'existe pas dans l'homme qu'elles ont en face d'elles), comme une règle immuable de la nature.

Derrière ce comportement acquis, on dénote des notes de fatalisme, de découragement a priori, à la fois quant à une nature présupposée de l'homme, et quant à une dévalorisation de soi vue comme inévitable, et cachée par les phrases de « je ne peux pas lui dire non », « je ne peux pas lui résister », ou « je n'ose pas », « je vais lui faire de la peine », etc. La peur est toujours là, latente, une peur qui peut n'être pas en adéquation avec la réalité.

Ce jeu fausse, bien entendu, complètement la donne entre les deux partenaires, allant même, parfois, jusqu'à provoquer l'apparition de comportements abusifs chez les hommes eux-mêmes ! En se conditionnant à donner ces prérogatives aux hommes, les femmes se méprisent elles-mêmes au nom d'une représentation archétypale de la sexualité dans laquelle l'homme est le monstre caricatural. Cette position dessert au plus haut point la femme qui en se positionnant en tant qu'objet sexuel, invite l'homme à utilisation son corps en tant qu'objet sexuel. Nous sommes en plein cercle vicieux.

On n'insistera jamais assez sur le fait que rendre tabou la sexualité (ou la garder tabou) est très dangereux pour la construction de l'image de la sexualité pour l'adolescente à la puberté. Caricaturer les hommes est un acte irresponsable, quoique bien souvent inconscient, de la part des mères qui, voulant protéger leurs filles, projettent sur elles leurs propres angoisses d'adultes en recyclant les angoisses héritées de leurs propres mères. Ainsi, si aucune mère ne travaille sur elle ou ne fréquente le divan d'un psychanalyste, la chaîne de mauvaises représentations de l'homme passe, comme la névrose, de génération en génération.

On retrouve alors des femmes dont la représentation de l'homme semble dater du siècle dernier et est faite a priori d'un mélange de respect obligatoire, de peur et de soumission sexuelle. S'il est difficile pour ces femmes de sortir de leur névrose héritée pour percevoir une réalité différente, il leur est très complexe de s'autoriser à avoir du désir, et conséquemment, du plaisir.

La femme fatale, archétype négatif de l'homme bestial

Un certain nombre de femmes croient résoudre le cercle vicieux d'un conditionnement féminin en apparence protecteur mais en réalité soumis, en faisant de la surenchère sexuelle, c'est-à-dire en voulant jouer avec les hommes sur leur propre terrain, soit le terrain de l'instrumentalisation de l'autre. Notons que cette approche de la sexualité est aussi névrotique que celle des l'homme « bêtes de sexe »[5].

La femme fatale accepte l'instrumentalisation de son propre corps dans certaines conditions, notamment lorsqu'elle soumet les hommes. Car, ce qu'elle accepte, au fond, c'est d'être la première et la seule à instrumentaliser son propre corps pour ses propres désirs. On voit ici que, loin d'être une « femme libérée » sexuellement parlant, c'est une femme qui a intériorisé si profondément l'état de femme objet qu'elle est la première à se dégrader vis-à-vis d'elle-même. Ce que l'on peut souhaiter de meilleur à ses femmes est de tomber amoureuse d'un homme qui refuse ces jeux de domination, quitte à placer la femme devant ses propres contradictions.

La plupart du temps intelligente, voire cérébrale, elle sait se choisir des partenaires qui ne sont pas trop « dangereux », ou dont le pouvoir de résistance n'excède pas ses propres capacités de domination. Elle endosse une libido très masculine le plus souvent dans sa régularité et prend la place de maître dans la relation homme femme. On pourrait d'ailleurs se demander quel type d'orgasmes la femme fatale peut connaître, le plaisir féminin étant plus un plaisir obtenu en état de confiance, voire d'abandon. En état de domination, l'intellect est encore trop vif pour permettre l'abandon à la puissance réelle de l'orgasme et de manière générale, à la montée du plaisir. Ainsi, on peut suspecter chez la femme fatale des problèmes de type orgasmiques.

La femme fatale est le négatif archétypal de l'homme bestial : elle prend ses caractéristiques au niveau de la libido et de la domination, elle veut comme l'archétype masculin dominer et faire peur, et œuvrer pour son propre plaisir égoïste. Et elle se sert de la supériorité de la libido féminine (notamment la capacité à jouir plus longtemps) pour juger l'homme au regard de sa performance.

Il faut insister sur l'aspect pathologique de ces deux archétypes, cela malgré les discours. Le « gros baiseur », « queutard », la « femme fatale », la « mangeuse d'hommes » incarnés dans des personnes vivantes sont à plaindre dans la mesure où leur discours, souvent très publicitaire[6], est totalement désincarné. La performance de l'homme est contrebalancée par la performance de la femme, le tout noyé dans un discours an-affectif, souvent des plus navrants.

La « femme fatale » tout comme le « queutard » ne pensent qu'au sexe, qu'avec leur sexe, et le plus souvent souffrent d'un grand problème de relation avec l'affect. Car s'il est simple d'instrumentaliser son corps dans une surenchère de débauche sexuelle, s'il est simple d'être celui qui contrôle sa propre dégradation physique, il est beaucoup plus difficile de se demander ce qui intérieurement pousse à valoriser en soi la domination de l'autre - de quelque sexe que soit l'autre.

L'homme schizophrène

Nous allons revenir aux hommes et tenter de sortir des archétypes extrêmes que nous venons de voir, à la fois chez l'homme et chez la femme. Car, il faut l'admettre, la tendance masculine (comme féminine) à limiter la relation homme femme à une relation purement sexuelle (au sens large du terme) est, somme toute, assez rare. Nous noterons de plus qu'elle ne correspond pas, malgré ce que l'on pourrait croire, à l'archétype du Don Juan, sur lequel nous reviendrons.

On trouve plutôt, chez une grande partie des hommes, une approche quasi schizophrénique de la sexualité. L'homme semble osciller entre deux états : « contenté » et « en demande ». Si l'homme « contenté » est calme et a sa propre personnalité stable, l'homme « en manque de sexe » semble revêtir une seconde personnalité uniquement focalisée sur la poursuite de son désir sexuel. L'homme « en manque » semble alors « habité », « possédé » et la plupart des comportements civilisés que l'on constate chez lui d'habitude, semblent s'amenuiser. Ainsi, la plupart des femmes connaissent ces comportements étranges de l'homme qui veulent dire « faisons l'amour » sans le dire ou avec des périphrases dignes de la plus grande des imaginations.

La plupart des femmes sont souvent mal à l'aise devant cette pression masculine, et il suffit que la femme ait intériorisé cette notion caricaturale de l'homme pour qu'elle cède aux avances de l'homme, se croyant forcée, ou « pour faire plaisir », ou « parce que c'est comme ça », ou encore « parce que sinon, il ne m'aimera plus », etc. Le plaisir féminin étant plus complexe que le plaisir masculin, la femme, dans cette situation aculée, prend rarement du plaisir, ou du moins prend un plaisir la plupart du temps « basique ». C'est dans ces situations que les femmes simulent le plus, si elles ont des sentiments pour l'homme qui « insiste ».

Cette phase de pilotage par les instincts sexuels trouve sa fin après l'éjaculation. Nous préférerons dire « après l'éjaculation » que de parler de « situation post-orgasmique » car, l'assimilation de l'orgasme masculin avec l'éjaculation sous-entend une représentation simpliste de la sexualité masculine (que l'on trouve hélas beaucoup chez les hommes eux-mêmes). Une fois l'éjaculation passée l'homme redevient paisible, fatigué, passif, détendu. La caricature veut que l'homme s'assoupisse à ce moment (ce qui est souvent vrai).

La libido masculine

L'évolution de la libido de l'homme est assez simple dans sa structure générale. En fonction des hommes, on pourrait s'intéresser au concept de temps limite, temps maximum entre deux « éjaculations » dans un monde parfait, soit sans stimulation extérieure forte hormis sa partenaire. Ce temps, hors monde parfait, dépend de beaucoup de facteurs, notamment des excitations « externes » de type consommation de pornographie. Ce pendant, d'une manière générale (et dans des conditions identiques), il semblerait que chaque homme ait un délai plutôt régulier, même si on pourrait noter des variations saisonnières (printemps, été).

La libido masculine pourrait être vue comme une pression qui monte dans une cocotte minute. Dès que la pression devient suffisamment forte, le bouchon de la cocotte se met à tourner et l'homme est dans un état dans lequel le besoin sexuel devient très présent, souvent inconsciemment d'ailleurs. La plupart des hommes regardent plus les femmes dans cet état et vont jusqu'à détailler, souvent d'une manière assez grossière, leur anatomie plus qu'ils ne le feraient d'habitude.

Quand l'homme a éjaculé après avoir fait l'amour (le pouvoir de la masturbation sur le contentement sexuel paraît moins fort), la cocotte minute a été ouverte, re-remplie d'eau et mise sur le feu. La pression prendra le temps habituel pour remonter.

L'incompatibilité des libidos

Chez la femme en revanche, le cycle de la libido est calqué sur le cycle menstruel avec une pointe de la libido autour des périodes d'ovulations pour la plupart des femmes. Chez la plupart d'entre elles, la période des règles est une période sinon de « non libido » du moins de diminution forte de la libido.

On pourra constater que les deux cycles de libidos de l'homme et de la femme ne sont pas compatibles a priori. Cela explique pourquoi l'homme inattentif à sa partenaire aura tendance à projeter sur sa compagne la régularité de ses propres désirs sexuels, pouvant causer chez elle, un certain agacement. En effet, la plupart des femmes étant assez discrètes quant à leur cycle menstruel, les hausses et baisses structurelles de la libido féminine peuvent être interprétées faussement comme une incohérence féminine par l'homme inattentif.

Dans le couple, cette incompatibilité des libidos est très importante à comprendre, à la fois pour l'homme et pour la femme, afin que l'un ou l'autre continuent d'envisager l'acte sexuel comme un plaisir partagé soumis à des contraintes qui sont celles de la nature. Un grand nombre de problèmes de couples viennent de problèmes sexuels et de non prise en compte de la différence physiologique et des rythmes de libido des deux partenaires.

Certains comportements sont à éviter notamment celui où, sous la pression de l'homme libidineux, la femme cède. La conséquence de ce comportement est d'autoriser l'homme, implicitement, à commander de manière unilatérale l'acte sexuel du couple, autorisation qui devient vite, avec le temps, un « droit acquis » de l'homme sur la femme. Souvent incapables de remettre en cause ce « droit acquis » construit durant les premiers mois de la relation, la femme se voit contrainte de subir. Si elle aime l'homme, elle aura tendance à simuler, si elle découvre qu'elle ne l'aime pas, elle le quittera si elle a suffisamment d'énergie ou restera dans la misère sexuelle dans le cas contraire. Ces obligations tournant vite au rituel, la libido de la femme peut diminuer jusqu'à connaître une certaine insensibilité progressive qui peut parfois tourner au dégoût. L'acte sexuel « obligatoire » deviendra un jour le grand sujet de rancœur au sein du couple at agrégera les insatisfactions de l'un comme de l'autre.

Bien entendu, si la femme refuse tout le temps sous la pression de l'homme libidineux, c'est l'homme qui, un jour, aveuglé par ses pulsions sexuelles, aura tendance à être sera attiré par d'autres femmes. La littérature est emplie de ce genre d'histoires sur lesquelles je ne m'attarderai pas.

Tout se passe comme si le couple, durant le prélude à la relation sexuelle se répartissait les rôles : l'homme ayant le rôle de demander et la femme ayant souvent le rôle de dire « oui » ou « non ».

Trouver un terrain d'entente

Bien sûr, il est nécessaire de trouver un terrain d'entente dans le couple afin que les relations sexuelles trouvent leur place dans la plus grande et la plus totale entente. Il faut le dire encore et encore, la relation sexuelle surtout dans un cadre d'amour entre les deux partenaires, devrait être un plaisir partagé. Si ce n'est pas le cas et que quelque élément vienne perturber ce plaisir commun, il faut arrêter l'acte afin de tirer au clair ce qui ne va pas afin d'en faire un plaisir partagé.

Cela commence par la communication avant l'acte, et s'il le faut pendant l'acte sexuel lui-même. Avant l'acte, la logique voudrait que la libido de la femme pilote les relations sexuelles, car la libido de l'homme étant régulière, si l'homme pilote les relations sexuelles, il risque de tomber dans une phase basse de la libido féminine. Or, le plaisir féminin étant ce qu'il est, toute pression en amont de l'acte sexuel peut se solder par un non plaisir chez la femme - ou du moins un plaisir non orgasmique. L'homme doit donc se poser la question de ce qu'il cherche : cherche-t-il son propre plaisir, son propre « droit » en stimulant l'inconscient collectif féminin sur la question du « devoir conjugal » ou cherche-t-il le plaisir partagé ? Dans le second cas, il doit laisser la femme s'exprimer.

La plupart des hommes lisant cet article pourraient rétorquer que la libido féminine « s'endort » si elle n'est pas stimulée. Nous répondrons par le couplet de Georges Brassens :

Quatre-vingt quinze fois sur cent
La femme s'emmerde en baisant
Qu'elle le taise ou le confesse
C'est pas tous les jours qu'on lui déride les fesses
Les pauvres bougres convaincus
Du contraire sont des cocus
A l'heure de l'œuvre de chair
Elle est souvent triste, peuchère
S'il n'entend le cœur qui bat
Le corps non plus ne bronche pas

Il serait nécessaire pour les hommes de laisser à la femme la possibilité d'exprimer sa libido afin de vérifier si cette dernière « s'endort » vraiment en n'étant pas stimulée. Nous n'en croyons rien. Nous croyons qu'au contraire, se glisser dans des moules et des rôles préformatés tue la libido.

Si besoin est, la communication entre les deux partenaires pourra aller jusqu'à la communication durant l'acte lui-même, ce qui peut avoir pour effet de faire baisser la « concentration » des deux partenaires, voire de stopper net l'acte en plein milieu. Le jeu en vaut la chandelle s'il y a un problème, notamment un malaise relatif au rôle, ou à tout autre point purement « technique ». Il n'est pas bon de débriefer ses douleurs sexuelles a posteriori mais de les signaler pendant qu'elles arrivent, afin que l'homme développe cette sensibilité au plaisir féminin.

Cette communication entre les partenaires doit s'établir dans une grande transparence et non dans un ersatz de communication. Il est donc nécessaire d'éviter les simulations d'écoute résultant d'un plaisir égoïste. Bien entendu, le résultat de l'écoute est l'action voire la modification des comportements. Si l'homme peut y perdre ses « prérogatives sexuelles traditionnelles », il peut y gagner une compagne.

La communication dans le couple sexuel est très importante car le terrain sexuel a cela de particulier que des expériences mauvaises peuvent être rapidement traumatisantes. Bien évidemment, le plus jeunes sont les victimes, les plus graves sont les traumatismes. De plus les traumatismes sexuels « verrouillent » souvent d'autres traumatismes antérieurs et aggravent les névroses infantiles.

Car, la plupart des personnes ayant eu des relations sexuelles traumatisantes restent les femmes (le traumatisme sexuel est en effet plus rare chez les garçons hétérosexuels[7]). L'homme pénètre, et la femme est pénétrée, ce qui explique que la répartition des traumatismes. Il est plus traumatisant de se faire pénétrer que de pénétrer, et les hommes consommant de la pornographie devraient s'en rappeler un peu plus souvent.

Eléments sur le plaisir féminin

L'auteur n'étant pas une femme, nous nous excusons d'emblée de n'avoir qu'une idée « externe » du plaisir féminin et non une expérience vécue de l'intérieur de ce plaisir. Ainsi, nous ferons de notre mieux pour ne pas dire trop de bêtises ni tenter de dire plus que nous ne pensons bon de mentionner sans risque.

Contrairement au plaisir masculin, le plaisir féminin est une alchimie complexe. Une même femme, suivant son état intérieur, son humeur, son état de fatigue, de stress, le moment de son cycle, etc., peut réagir de manière différente aux même stimuli. Cette constatation est importante pour les hommes qui envisagent que faire l'amour est un plaisir partagé. En effet, même si la femme aime habituellement certaines choses ou positions, il se peut que la façon dont elle les aime ne soit pas la même aujourd'hui qu'hier. Il y a donc nécessité chez l'homme de s'adapter à sa partenaire qui, si elle peut théoriquement avoir plusieurs orgasmes dans la même relation sexuelle, aimerait souvent en avoir déjà un à chaque fois, ce qui est loin d'être le cas.

On voit bien ici l'inadéquation des « techniques » sans âme que la pornographie standardisée propose dans le cadre du plaisir féminin. Il n'y a pas de recette pour mener une femme à l'orgasme sinon l'écoute de la montée de son plaisir, et l'adaptation à ses baisses de sensibilité par des changements de stratégie ou de tactique. Ainsi, la ritualisation sexuelle pornographique est très éloignée de la façon de faire monter le plaisir chez la femme. Certes, prises individuellement, les « techniques » sont les mêmes, mais ces techniques doivent être adaptées à la partenaire.

L'homme doit réaliser que, durant l'acte sexuel, il est généralement le facteur limitant, car une fois son éjaculation faite, il est très rare qu'il puisse garder une érection. Sa partenaire est obligée de voir son plaisir s'éteindre qu'elle ai ou non atteint l'orgasme. L'homme doit donc se considérer comme au service du plaisir de la femme, car c'est là sa seule position crédible pour mener sa partenaire à l'orgasme. La femme, de son côté, doit atteindre cet état d'abandon qui est surtout l'état de suspension de l'activité intellectuelle.

Si une femme est trop intellectuelle, il lui faudra généralement une plus longue préparation pour la faire quitter une inévitable pensée qui vient « regarder et analyser » quand le plaisir monte et qui a tendance à le tuer. La femme cérébrale n'aime pas perdre le contrôle et c'est souvent du fait de sa peur de l'homme. Les femmes intellectuelles et « contrôlant » ont donc plus souvent que les autres femmes des problèmes à atteindre l'orgasme - si elles l'ont jamais atteintes.

Recommandations techniques

Quoique les hommes puissent voir dans la pornographie, notamment les jeunes hommes, certaines techniques sexuelles ne sont pas sans danger, ni sans risque de douleur pour la femme. On conseillera aux lecteurs des traductions originales du Kama Sutra[8] indien, et non des copies occidentales sans intérêt. L'éducation sexuelle des jeunes adultes passe par différents types de connaissances qu'il n'est pas toujours agréable de découvrir in situ.

De manière générale, les hommes devront faire attention aux fellations qui ont souvent un caractère très dégradant dans la pornographie (et même d'ailleurs dans un certain nombre de films à diffusion beaucoup plus large). La fellation est, elle aussi, une technique qui doit s'appliquer à deux dans le souci d'un plaisir commun - tout comme le cunnilingus. Il en est de même de la sodomie qui est souvent beaucoup plus complexe à mener sans douleur que les films pornographiques peuvent le laisser supposer. Nous recommandons à tous les lecteurs de lire les conseils des sites spécialisés sur le net sur ses sujets avant de s'attaquer à ce genre d'exercice une fois encore à deux. Il est nécessaire de comprendre que si des exercices comme ces derniers peuvent être source de plaisir, ils peuvent aussi être source de douleur ou de traumatisme.

D'une manière générale, dans l'acte sexuel, tout acte doit être fait avec le consentement explicite des deux personnes, chaque personne agissant sans pression, et ayant le droit de stopper l'acte à tout moment. A tout moment, tout le monde a le droit de dire : « je ne fais pas » - même dans les conditions où l'affect pour le partenaire est grand. Aimer ne veut pas dire faire tout sexuellement pour l'autre.

Eduquer contre la peur

Mettre le plaisir féminin au centre de la relation sexuelle, œuvrer pour que la femme ait un plaisir toujours renouvelé, voilà quel pourrait être le credo de l'homme attentif, homme non archétypal, éduqué à la sexualité et ouvert au plaisir de sa partenaire, conscient que l'expérience sexuelle doit être menée de manière responsable dans un but de plaisir partagé et de respect de la libido féminine. La découverte du plaisir de la femme étant, en elle-même, un plaisir toujours renouvelé aux mille et une variations, nous les hommes, faisons l'apologie du plaisir féminin !

Notes

  1. Nous reviendrons sur cette notion de « non perversion ».
  2. Ces chiffres sont donnés à titre indicatif et ils ne sous-entendent pas que toutes les femmes de cette génération présentent les mêmes visions.
  3. Cette instrumentalisation peut même aller très loin, dans les violences conjugales avec viol, sujet on ne peut plus tabou encore aujourd'hui en France.
  4. Cela peut aussi expliquer le militantisme extrême de certaines féministes, parfois objectivement victimes d'abus sexuels et en projection inconsciente de leur douleur personnelle passée sur d'autres femmes, moins marquées par la vie.
  5. Les fans de l'hédonisme sexuel seront probablement scandalisés par cette affirmation, mais nous avons une plus haute opinion de l'homme pour penser que l'obsession sexuelle couplée à la satisfaction matérielle des bas instincts ne soit pas un tantinet névrotique.
  6. Les femmes fatales s'expriment sur le net et nous conseillons les lecteurs à aller lire un peu leurs blogs, parfois pathétiques.
  7. Nous ne pouvons pas nous exprimer sur le cas des personnes homosexuelles car nous ne le connaissons pas.
  8. Voire en ligne le texte intégral du Kama Sutra.